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lundi 2 mars 2009

MORALISATION DE LA VIE PUBLIQUE PAR GBAGBO Ce que prépare l’opposition

Dire que le chef de l’Etat, Laurent Gbagbo est déterminé à nettoyer les écuries d’Augias relève d’une lapalissade. Depuis plusieurs mois, il s’est lancé dans une sorte d’opération mains propres. Il a fait muter certains de ses collaborateurs -les plus chanceux- à l’extérieur, quand d’autres -les moins chanceux- ont été jetés en prison. Le patron du Palais présidentiel n’a pas hésité à affecter, en mai 2008, à l’extérieur son Directeur de protocole, Allou Eugène et son aide de camp, Raphaël Logbo. Depuis juin 2008, des dirigeants de la filière café-cacao sont à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA). Ils sont pour la plupart proches de Laurent Gbagbo. Des ministres ont même été entendus dans cette affaire. Parmi ces membres du gouvernement, il y a Amadou Gon Coulibaly, ministre de l’Agriculture et Directeur national de campagne d’Alassane Dramane Ouattara. Son audition ainsi que celles des ministres, Alphonse Douati, Sébastien Dano Djédjé, Paul Antoine Bohoun Bouabré, issus du FPI, et Charles Koffi Diby (société civile) ont été autorisées au cours du conseil des ministres du 14 août 2008. Le numéro 1 ivoirien, recevant les vœux de nouvel an, le 21 janvier dernier, a dit sa détermination à laisser conduire « jusqu’au bout » l’enquête dans la filière café-cacao. « Je ne vais pas me permettre de faire des commentaires sur un problème qui est pendant devant la justice, mais, je voudrais seulement dire à tous les gens qui grenouillent, à ceux qui se lèvent et vont dire au juge : le président Gbagbo dit de libérer les gens. Je n’ai envoyé personne. Et je n’enverrai personne », avait martelé M. Gbagbo. Bien plus, il avait affirmé, devant le corps diplomatique, ce jour-là, son intention d’étendre la moralisation de la vie publique à d’autres secteurs. « Dès l’instant où avec l’accord politique de Ouagadougou, j’ai fini la vraie guerre, je mène à présent la guerre pour rendre compte de la gestion de l’argent public qui est une véritable plaie (…) J’ai écrit au procureur de la République quand je me suis rendu compte que les rumeurs avaient un fondement. Et nous avons commencé dans le café-cacao. Ce n’est pas le seul secteur. Nous sommes en train d’instruire sur d’autres secteurs », avait-il révélé. Début février, le porte-parole de Laurent Gbagbo annonçait que l’une des secrétaire du chef de l’Etat s’est rendue coupable d’une escroquerie portant sur la somme de plus de 65 millions de F Cfa au préjudice de la société MTN. Jugée en flagrant délit, la dame et sa complice ont été condamnées à cinq ans de prison le 11 février dernier. Comme si cela ne suffisait pas, en fin de semaine dernière, le procès des agents fictifs de la présidence de la République a débuté. Le verdict est attendu pour ce mardi.

Faire la part des choses Fait marquant : pour ce cas comme pour celui de la secrétaire, c’est la présidence de la République qui a porté plainte. Et, ce n’est pas fini. En tout cas, si l’on s’en tient à l’information livrée par l’hebdomadaire Jeune Afrique dans son édition du 22 au 28 février 2009. A en croire ce journal, des personnalités proches du chef de l’Etat comme le pasteur Koré Moïse, conseiller spirituel, Jacques Anouma, Directeur administratif et financier, le général de la police à la retraite, Jean Pierre Lorougnon, patron des services de renseignements à la présidence, N’Zi Paul David, Directeur de cabinet seraient, elles aussi, menacées par le coup de balai du chef de l’Etat. Selon nos sources, ces affaires sont très suivies par l’opposition. Une opposition qui gère des ministères et bien de structures publiques depuis le partage du pouvoir à Marcoussis en janvier 2003. Pour elle, si le chef de l’exécutif ivoirien frappe dans son propre camp, c’est pour préparer l’opinion à accepter « la moralisation » de l’opposition. Elle prépare donc sa réaction. Des opposants au régime de Laurent Gbagbo ont commencé à monter des dossiers dans les secteurs comme le pétrole, la téléphonie mobile et autres dirigés par des proches du chef de l’Etat, précise une source au sein du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Il s’agira, a expliqué notre interlocuteur, de brandir ces dossiers au moment où le chef de l’Etat va envoyer son balai « dans la maison de l’opposition ». Le hic dans cette affaire, c’est que tous les coups seront permis. Même les faux. Certains n’hésiteront pas, a-t-on appris, à faire sortir des documents de supposées malversations. « La communication va jouer un rôle important dans cette campagne. On fera savoir que M. Gbagbo fait une chasse aux sorcières et que les voleurs sont plutôt dans son camp », a souligné notre informateur. Du côté du FPI, on confirme l’information. Un membre du secrétariat général de ce parti s’est insurgé contre cette manière de faire. « C’est un chantage que veut faire l’opposition. Mais que les opposants se le tiennent pour dit : nous n’allons pas laisser prospérer ce chantage », a-t-il mis en garde, se réjouissant que les structures chargées de faire les audits et la justice sont là pour tirer les bons grains de l’ivraie. Il importe de ne pas faire de délations en mêlant la politique à la moralisation de la vie publique.

Sylla ARUNA

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