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lundi 2 mars 2009

Afrique de l'Ouest: Appliquer les conventions sur les droits de la femme

Des parlementaires ouest-africains réunis du 16 au 18 février à Lomé, la capitale du Togo, ont appelé les Etats de la sous-région à mettre en application les différentes conventions sur les droits de la femme qu'ils ont ratifiées.

«Il y a beaucoup de conventions que nos pays ratifient, mais l'application pose problème», a regretté Oumou Sow, une participante du Sénégal, à la rencontre organisée par l'Union inter-parlementaire (UIP) et qui s'est achevée mercredi. Elle a regroupé des parlementaires de six pays ouest-africains : Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal et Togo.

Pour Mathurin Coffi Nago, président du parlement béninois et membre du conseil exécutif de l'UIP, la ratification d'un traité engage un Etat dans sa totalité. «Nous avons la responsabilité de mettre en oeuvre et de faire respecter les droits inclus dans les traités auxquels l'Etat est partie et ce, à travers nos fonctions législatives, représentatives, budgétaires et de contrôle de l'exécutif», a-t-il déclaré aux participants.

Selon plusieurs analystes, la non-application des instruments relatifs aux droits de la femme, freine leur promotion et leur présence dans la vie politique.

Nago a déploré également qu'en Afrique de l'ouest, les femmes parlementaires représentent moins de 19 pour cent des effectifs. Au Bénin, elles sont neuf femmes sur 83 députés, neuf sur 81 au Togo, 17 sur 111 au Burkina Faso, 15 femmes sur 147 députés au Mali, 15 sur 113 au Niger et 45 femmes sur 150 au Sénégal, selon les documents de la conférence.

Selon Nago, il est normal que les femmes, qui représentent environ la moitié - parfois plus - de la population, puissent aspirer à une représentation plus équitable dans les institutions de gouvernance des Etats.

Au cours de la rencontre dont le thème est "Pour une meilleure promotion des droits de la femme : quel rôle pour les parlementaires de la sous-région ouest-africaine", les participants ont été informés sur le principe de l'égalité des sexes énoncé dans les instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits des femmes.

Une attention particulière a été accordée à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), adoptée le 18 décembre 1979 par l'Assemblée générale des Nations Unies, le Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, relatif aux droits des femmes, adopté par l'Union africaine à Maputo, au Mozambique, le 11 juillet 2003.

Les participants ont dressé un bilan maigre de l'application de ces instruments dans la sous-région ouest-africaine francophone, comparé leurs expériences en la matière et identifié les mesures nécessaires à leur mise en oeuvre. Les parlementaires ont donc été exhortés à s'informer sur le contenu des instruments relatifs aux droits de la femme, à agir au niveau législatif pour mettre en conformité les lois nationales avec les instruments internationaux ratifiés par leurs pays respectifs.

«Les assises de Lomé se tiennent à un moment où nos sociétés, en quête de progrès et de justice, prennent progressivement conscience du rôle incontournable de la femme dans toute politique de développement», a dit Nago. «Nous avons également l'impérieux devoir de renforcer l'action de nos parlements ... pour promouvoir les droits des femmes et respecter nos engagements internationaux dans ce domaine».

Pour Safiatou Touré-Traoré une députée du Mali, la grande partie de la lutte revient aux femmes elles-mêmes, notamment celles qui sont au parlement. «C'est à nous femmes de mener ce combat pour que les instruments ratifiés soit appliqués, il faut y croire et s'y mettre», a-t-elle affirmé à IPS. Elle espère que les actions menées porteront leurs fruits pour que le parlement malien atteigne bientôt 30 pour cent de femmes députées.

«Il faut que nous qui avons cette chance d'être au parlement, nous luttions afin qu'il y ait beaucoup de voix au parlement et dans les instances de décisions pour faire avancer les choses pour plus de présence féminine en politique», a souligné Zeynabou Drabo, une députée du Burkina Faso.

«Nous devons faire en sorte que nos soeurs, qui n'ont pas embrassé la politique l'aiment et s'y adonnent, ceci par notre comportement, notre manière de faire. Par notre approche, elles se verront d'abord impliquées dans les sphères politiques et elles seront actives politiquement et prétendre après à des postes», a-t-elle expliqué à IPS.

Selon Drabo, «La politique est vue négativement pour les femmes dans certains milieux où nous sommes accusées de tous les maux», et où, ajoute-t-elle, des hommes disent qu'ils ne vont pas laisser leurs femmes faire de la politique.

Christine Mensah-Atoeme, une députée du Togo, propose une vaste campagne de sensibilisation à travers les pays pour faire prendre conscience aux femmes qu'il leur revient d'arracher des droits en s'engageant politiquement. «Ce que nous allons faire, c'est de conscientiser les autres femmes qui hésitent encore à venir en politique», a-t-elle dit à IPS.

Pour sa part, Selom Komi Klassou, vice-président de l'Assemblée nationale du Togo, a estimé qu'il était important que plusieurs actions soient menées pour plus de présence féminine en politique en se basant, par exemple, sur le Protocole à la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, relatif aux droits des femmes.

Ce protocole met l'accent sur le droit de participation de la femme au processus politique et à la prise de décisions, appelant les États à entreprendre des «actions positives spécifiques pour promouvoir la gouvernance participative et la participation paritaire des femmes dans la vie politique de leurs pays».

Selon le protocole, les femmes doivent participer à toutes les élections sans aucune discrimination, et être représentées en parité avec les hommes, à tous les niveaux, dans les processus électoraux, et dans l'élaboration et de la mise en oeuvre des politiques et programmes de développement de l'État.

«Au Togo, lors des dernières élections législatives (octobre 2007), des dispositions appropriées ont été prises pour encourager les partis politiques à privilégier les candidatures féminines», a affirmé Klassou à IPS.

Le gouvernement togolais a également réduit de 25 pour cent la caution fixée à 400 dollars environ, pour les femmes candidates aux législatives, la ramenant à 300 dollars. Mais ces deux mesures n'ont pas encore favorisé l'élection d'un grand nombre de femmes au parlement.

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