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dimanche 5 octobre 2008

Au procès des déchets du Probo Koala, le principal accusé accable Trafigura

Au deuxième jour du procès des déchets mortels du Probo Koala, déversés en août 2006 à Abidjan, le principal accusé s'est défendu avec force devant la cour d'assises de Côte d'Ivoire en affirmant avoir été "trahi" par la multinationale Trafigura, affréteur du bateau. Accusé "d'empoisonnement", Salomon Ugborugbo a vivement critiqué mercredi le rôle de la filiale locale de Trafigura, Puma Energy, qui avait choisi sa petite société Tommy pour récupérer les résidus du nettoyage des cales (slops) du Probo Koala, un cargo spécialisé dans le transport d'hydrocarbures. A la barre, M. Ugborugbo a expliqué avoir été "trahi" par l'administrateur de Puma Energy, N'Zi Kablan, qui lui aurait caché la nature toxique des 528 m3 de slops à pomper dans le Probo Koala. Il s'agissait pour lui de "slops ordinaires", c'est-à-dire des "eaux usées" mélangées avec des "produits de nettoyage", comme de "l'eau de javel". "Je ne suis pas chimiste. J'ai fait confiance à sa parole", a ajouté le patron de Tommy après avoir reconnu que M. Kablan lui avait montré - avant l'arrivée du cargo - un fax de Trafigura précisant qu'il s'agissait de "slops chimiques". Selon ce fax, dont des extraits ont été lus à l'audience, les slops contenaient un "mélange d'essence, de soude caustique, avec une forte concentration de mercaptan", composant à l'odeur nauséabonde. "Il a surtout insisté sur l'odeur", a affirmé M. Ugborugbo à propos de M. Kablan. "Kablan savait très bien que c'étaient des matières dangereuses et il aurait dû contacter le département des matières dangereuses du port (autonome d'Abidjan)", a-t-il poursuivi. Il en a voulu pour preuve que le Probo Koala avait eu "des problèmes" lors de précédentes escales, notamment au port d'Amsterdam. Le patron de Tommy, qui n'avait reçu son agrément d'avitailleur du ministère ivoirien des Transports qu'en juillet 2006, s'est présenté comme un "novice" trompé par le responsable de Puma Energy qui "travaillait depuis plus de 15 ans dans les produits pétroliers". "Je lui ai dit où j'allais les déverser", a-t-il souligné, racontant avoir contacté la décharge publique d'Akouédo (district d'Abidjan). M. Ugborugbo a ajouté ne s'être douté de quelque chose que lorsque M. Kablan lui a demandé de facturer le travail à "1.000 dollars" le mètre cube alors qu'il était payé "35 dollars" par m3. L'accusé, qui risque la prison à perpétuité, a par ailleurs affirmé avoir montré le fax de Trafigura à la société gérant la partie "déchets industriels" de la décharge et obtenu son accord verbal. Il a également affirmé que des agents de la Société nationale des opérations pétrolières de Côte d'Ivoire (Petroci, publique), sur le quai de laquelle se trouvait le Probo Koala, étaient montés à bord du cargo en raison de l'odeur pestilentielle des slops. Un "officier" du Probo Koala et "des experts de Trafigura" présents à bord les ont alors convaincus que "le produit n'était pas dangereux", permettant au pompage de continuer, a affirmé M. Ugborugbo. Rebondissant sur ces déclarations, les avocats de la défense se sont étonnés M. Ugborugbo n'ait jamais été confronté pendant l'instruction avec ces agents, ni ceux de la société travaillant à la décharge d'Akouédo. Ils ont aussi regretté l'absence de M. Kablan, pourtant cité comme témoin par la cour. Le dirigeant de Puma Energy, tout comme les cadres de Trafigura, a bénéficié d'un non-lieu lors du renvoi de l'affaire devant les assises. Le 13 février 2007, Trafigura avait obtenu l'arrêt de toute poursuite judiciaire à son encontre, y compris sa filiale, au terme d'un accord à l'amiable avec l'État ivoirien. Ce dernier a reçu en contre-partie une indemnisation globale de plus de 100 milliards de FCFA (152 millions d'euros).

source: AFP

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